appel à communication : Amour et Justice

Sujet : discours juridique et amours littéraires du Moyen-âge aux Lumières
Lieu : Brest
Date : les 13 et 14 octobre 2011
Proposition à rendre avant le : 1er juillet 2011
Contact : Jean-Pierre.Dupouy@univ-brest.fr et gabriele.ribemont@univ-orleans.fr
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     Depuis l’Antiquité, la littérature nous a conté les rencontres amoureuses entre un homme et une femme et les liens qui les unissent par amour ou par raison d’état. Et dans leur gestes et leurs actes se reflétaient souvent des rituels informés des mœurs, voire du droit, à peine reconnaissables sous la plume d’un écrivain, condensant dans son langage poétique, effleurant le symbolique d’un acte individuellement et socialement crucial.

     Quand le mariage lui-même devient objet de réflexion et de changements introduits dans le droit canonique, puis dans le droit royal, quand les tensions et les luttes d’interprétation et de compétence vont en augmentant, les poètes se saisissent d’autant plus des questions juridiques en leur donnant leur propre langage qui réussit si bien à camoufler le discours structurant. Et les manières dont la littérature se greffe sur le discours juridique sont nombreuses : ● celui-ci peut être au service de l’intrigue, p.ex. fonder une légitimité promulguée par le texte littéraire ou encore la réfuter (comme dans Partonopier und Meliur de Konrad von Würzburg), ● il peut lui-même devenir le sujet d’un texte littéraire qui discute ouvertement des questions concernant les liens interpersonnels ou qui invente des intrigues capables d’illustrer ou de malmener un article particulier (enlèvements, empêchements, mariage à la Gaulmine…) sous des formes tout à fait différentes, allant des comédies de Molière jusqu’au roman à la première personne tel La Vie de Marianne de Marivaux ou les Mémoires d’Anne-Marie de Moras de Mouhy, ● il peut également être le moyen privilégié pour développer une intrigue, des caractères ou des sentiments (comme dans les comédies de Destouches où le caractère central est mis en relief par la question du consentement parental, condition sine qua non du mariage français), ● mais le discours juridique peut aussi prêter une forme (tribunal, plainte, plaidoyer, arrêt, ordonnance…) à l’expression littéraire de l’amour qui la transpose ou la parodie. C’est ainsi que, dans la tradition des Arrêts d’Amour de Martial d’Auvergne (savamment commentés par le juriste Benoît Lecourt) et des Droits nouveaux de Guillaume Coquillart, le discours amoureux emprunte au droit - entre sérieux et humour, de l’injonction morale à l’obscénité cryptée – ses modes de codification. Et lorsque la poésie pétrarquiste est produite par des écrivains-juristes (comme Louis Le Caron ou Etienne Pasquier), elle ne peut échapper à une contamination des formes judiciaires, la maîtresse redoutée prenant, sur la scène d’un procès imaginaire, la figure de l’accusatrice qui serait aussi juge sans appel.


     C’est sur ces croisements entre codes juridiques et littéraires, du Moyen Age à l’époque classique, que le colloque aura à s’interroger, pour essayer d’en préciser les diverses modalités et finalités.