Soutenance HDR

Soutenance d'Habilitation à Diriger des Recherches d'Anna CAIOZZO sur le Mythe, l'Image et l'Imaginaire en Orient


Discipline : Histoire
Date : vendredi 4 novembre 2011
Heure : 14h
Lieu : amphithéâtre de l'IRD (5 rue de Carbone)

Résumé : Le dossier Mythes, Images et Imaginaire, regroupe une sélection d’articles et une monographie publiées entre 1999 et 2011 évoquant l’imaginaire des cieux, des terres et du pouvoir politique dans le monde oriental médiéval, tel qu’il s’exprime dans les manuscrits à peintures arabes, persans et turcs entre le XIIe et le XVe siècle.
L’inédit, Les imaginaires du roi glorieux. Éléments pour la lecture des copies enluminées du Shâh Nâma de Firdawsî (époque timouride), retrace les principaux mythes de la grande épopée des rois de Perse, le Shâh Nâma, ou Livre des rois, versifiée par le poète Firdawsî de Tûs au début du XIe siècle, et son illustration à l’époque des princes timourides et turkmènes. Le Shâh Nâma est une œuvre littéraire majeure mais aussi une œuvre de mémoire qui restitue les grands épisodes de l’histoire de l’Iran, des origines à la chute de l’empire sassanide.
Au XIVe siècle, soit plus de trois cents ans plus tard, les Turco-Mongols font enluminer l’œuvre qui devient le prototype du miroir au prince illustré ; dès lors, le texte ne cessera d’être illustré, et ce jusqu’au XXe siècle (notamment en Inde), témoignant de l’histoire et de l’originalité d’un peuple désormais islamisé faisant corps autour de son histoire. Au XIXe siècle, l’orientaliste français Jules Mohl proposa une édition bilingue de l’œuvre qui fut utilisée non seulement par l’orientaliste allemand Fritz Wolff, mais aujourd’hui encore par le professeur Charles Melville, concepteur de la base de données iconographiques hébergée à Cambridge (R-U), qui recense les miniatures des plus célèbres manuscrits du Shâh Nâma depuis son illustration. Cette initiative permet aujourd’hui d’aborder de façon presque exhaustive le corpus d’époque médiévale.
Patrimoine iranien, le Shâh Nâma est aussi une œuvre phare pour l’historien de l’imaginaire qui découvre la richesse et la variété des mythes qu’elle regroupe et véhicule durant toute la période médiévale, du XIe au XVe siècle, de l’époque ghaznévide jusqu’à l’époque timouride et turkmène. Les imaginaires du roi glorieux proposent quelques éléments pour aborder l’herméneutique des miniatures du Shâh Nâma dès les premiers corpus et jusqu’à l’époque timouride. Cet essai retrace les éléments constitutifs des principaux mythes en œuvre depuis les rois primitifs jusqu’à la chute de la royauté sassanide. Il insiste sur les fondements du pouvoir royal dans l’Iran préislamique, et sur la notion de Gloire royale, émanation céleste, qui fut transmise par la suite au monde musulman et que le sultanat, bien après la chute du califat, reprit à son compte comme le montre l’exemple timouride. Par ailleurs, comme miroir au prince, le Shâh Nâma souligne les étapes du métier de roi : formation, éducation, geste initiatique et héroïque – un moment majeur plébiscité des enlumineurs –, puis l’exercice de la souveraineté où le roi est guidé par les cieux puis par les sages. Les illustrations témoignent enfin de la profonde souplesse d’une œuvre aisément adaptable à toutes les périodes en fonction des programmes iconographiques et des tendances idéologiques ; les dynasties timouride puis turkmène en firent des instruments de propagande montrant à la fois l’acculturation des souverains turcs à l’idéal iranien du pouvoir, mais aussi la vigueur des mythes qui, une fois islamisés, trouvèrent une nouvelle vie dans les imaginaires de leur temps.


http://www.univ-orleans.fr/actus/index.php?page=1&idt=2779&annee=2009